L’Ordonnance de protection


La victime de violences conjugales – c’est-à-dire de violences physiques, psychologiques, sexuelles ou économiques commises à son encontre par une personne avec laquelle elle est (ou était) mariée, pacsée ou en couple – qui estime que ces violences peuvent mettre en danger sa vie et celle de ses enfants, peut saisir le Juge aux affaires familiales afin que ce dernier prononce une ordonnance de protection (articles 515-9 et suivants du Code civil).

Il s’agit d’une procédure d’urgence, visant à protéger les victimes de violences conjugales lorsqu’il existe un danger pour elles ou ses enfants.

L’ordonnance de protection est délivrée, le cas échéant, dans un délai maximal de six jours à compter de la fixation de la date de l’audience.

Les conditions d’obtention d’une ordonnance de protection

Pour que l’ordonnance de protection soit prononcée, il doit exister des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblable la commission des faits de violences alléguées et que ces violences mettent en danger la partie demanderesse ou ses enfants.

Pour cela, il convient de produire autant d’éléments de preuve que possible : témoignages, photos et vidéos, échanges de messages avec l’auteur des violences, etc. Notamment, il est souvent avantageux (mais non obligatoire) d’adresser au Juge aux affaires familiales :

  1. Le récépissé de la plainte pénale déposée contre le conjoint pour violences conjugales (ou la décision prise, le cas échéant) ;
  2. Un certificat médical attestant des violences ;
  3. Une lettre émanant d’une association soutenant les femmes battues.

La procédure pour obtenir une ordonnance de protection

Afin d’obtenir une ordonnance de protection, la victime des violences conjugales doit s’adresser au Juge aux affaires familiales territorialement compétent. La demande s’effectue par écrit, via une requête qui doit comprendre les motifs de la demande ainsi que les pièces.

Après réception de cette requête et examen des conditions de recevabilité, le Juge aux affaires familiales fixe une date d’audience.

Cette date d’audience doit être signifiée au défendeur dans un délai de deux jours. Cette signification peut se faire :

  • Par un huissier contacté par le greffe du tribunal, si le demandeur n’a pas d’avocat ;
  • Par l’avocat, si le demandeur en a un ;
  • Par le procureur de la République lorsque ce dernier est à l’initiative de la demande l’ordonnance de protection ;
  • Par voir administrative si le Juge aux affaires familiales le décide (c’est-à-dire par les forces de l’ordre ou par l’administration pénitentiaire).

Le défendeur dispose ensuite d’un délai pour préparer sa défense (deux ou trois jours selon la date de signification).

L’audience se tient en principe cinq jours après la date de fixation de l’audience. Lors de l’audience, le demandeur et le défendeur peuvent chacun recourir à un avocat et sont entendus en leurs arguments. Les auditions peuvent se ternir séparément à la demande de la partie demanderesse ou si le Juge l’estime nécessaire.

Le Juge aux affaires familiales rend son ordonnance fixant les mesures de protection six jours après la date de fixation de l’audience.

Pour que cette ordonnance soit exécutoire, elle doit être signifiée à l’auteur par un huissier de justice.

Les mesures prononçables au titre de l’ordonnance de protection

Si le Juge aux affaires familiales considère que les faits de violences allégués sont vraisemblables et que ces violences mettent le demandeur et/ou ses enfants en danger, il rend une ordonnance de protection, dans laquelle il peut notamment :

  • Interdire au défendeur de recevoir ou de rencontrer certaines personnes (notamment le demandeur), ainsi que d’entrer en relation avec elles, de quelque façon que ce soit ;
  • Interdire au défendeur de se rendre dans certains lieux dans lesquels se trouve de façon habituelle le demandeur ;
  • Interdire au défendeur de détenir ou de porter une arme ;
  • Se prononcer sur la résidence séparée. La jouissance du logement est attribuée, sauf ordonnance spécialement motivée justifiée par des circonstances particulières, au conjoint qui n’est pas l’auteur des violences, et ce même s’il a bénéficié d’un hébergement d’urgence. Dans ce cas, la prise en charge des frais afférents peut être à la charge du conjoint violent ;
  • Se prononcer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et sur les modalités du droit de visite et d’hébergement ;
  • Autoriser le demandeur à dissimuler son domicile ou sa résidence ;
  • Proposer au défendeur une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ou un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes. En cas de refus de la partie défenderesse, le juge aux affaires familiales en avise immédiatement le procureur de la République.

Lorsque le Juge aux affaires familiales délivre une ordonnance de protection, il en informe sans délai le procureur de la République, auquel il signale également les violences susceptibles de mettre en danger un ou plusieurs enfants.

L’exécution de l’ordonnance de protection

Les mesures mentionnées sont prises pour une durée maximale de six mois à compter de la notification de l’ordonnance. Une prolongation est possible si, pendant ce délai, une demande en divorce ou en séparation de corps a été déposée ou si le juge aux affaires familiales a été saisi d’une demande relative à l’exercice de l’autorité parentale.

Le Juge aux affaires familiales peut, à tout moment, à la demande du ministère public ou de l’une ou l’autre des parties, ou après avoir fait procéder à toute mesure d’instruction utile, et après avoir invité chacune d’entre elles à s’exprimer :

  • Supprimer ou modifier tout ou partie des mesures énoncées dans l’ordonnance de protection ;
  • Décider de nouvelles mesures ;
  • Accorder au défendeur une dispense temporaire d’observer certaines mesures.

Le non-respect d’une ordonnance de protection constitue un délit sanctionné par 2 ans d’emprisonnement et une amende de 15 000€ (article 227-4-2 du Code pénal).

Date de l’article : 3 février 2023 | Par Lois Pamela LESOT